Donnez comme vous l’avez résolu !

Tandis que notre Église mondiale, au cours de ce trimestre, concentre son attention sur les leçons de l’École du sabbat sur la gestion chrétienne de la vie, un texte emprunté aux écrits d’Ellen G. White a attiré l’attention de nombreuses personnes : « Chacun doit être son propre répartiteur et donner comme il l’a résolu en son cœur.”[1] Ces paroles ont amené certaines personnes aux conclusions suivantes :

  • Il n’existe aucune instruction divine claire sur la nécessité de donner.
  • Dieu ne donne aucune instruction précise sur le pourcentage à attribuer à la dîme.
  • La dîme peut être calculée sur la partie (brut, net, ou autre) des revenus que chacun considère comme appropriée.

Ces conclusions mettent en avant une volonté humaine totale dans le domaine des dons. En examinant le chapitre 41, « Le caractère sacré des vœux », des Témoignages pour l’Église, vol. 1, pages 623–637, d’où est extraite cette citation, nous allons tenter d’estimer si ces conclusions sont en accord avec ce passage.

« Il n’existe aucune instruction divine claire sur la nécessité de donner »

En contraste avec la conclusion « Il n’existe aucune instruction divine claire sur la nécessité de donner », l’essence de ce chapitre est que Dieu désire que Ses enfants donnent. Ellen G. White emploie le mot « exigences » (en anglais, « claims ») pas moins de dix fois pour décrire l’attente de Dieu dans le domaine des dons. Dans l’un de ces cas, elle associe le mot « requiert » au mot « impérieux » : « Si un chrétien possède une certaine fortune, Dieu a des droits impérieux sur lui. Il doit non seulement donner la dîme, mais faire des offrandes » (p. 628). Dieu ne reste pas silencieux sur le besoin de ses enfants de donner. Un autre passage suggère la pensée précise de Dieu sur l’obligation de donner faite à tous, quelle que soit la source de leurs revenus : « Lorsque des hommes d’affaires, des propriétaires, des artisans, des marchands, des hommes de loi, etc., deviennent membres de l’église, ils deviennent également serviteurs du Christ ; et bien que leurs talents soient tout à fait différents, leur responsabilité de faire avancer la cause de Dieu par un travail personnel et par leur argent n’est pas moins grande que celle du prédicateur » (p. 630, 631). Donner est la responsabilité des rachetés.

« Dieu ne donne aucune instruction précise sur le pourcentage à attribuer à la dîme »

Il semble clair, en lisant ce chapitre, que Dieu avait instruit Ses enfants sur la manière de donner. Commentant l’expérience du patriarche Jacob au moment où celui-ci prononce un vœu, Ellen G. White nous dit-elle que Jacob voulait parler d’une dîme symbolique désignant n’importe quel montant ? La description de l’accomplissement du vœu de Jacob jette une lumière supplémentaire sur ce sujet : « Jacob donna la dîme de tout ce qu’il possédait. Puis il calcula l’intérêt de la dîme et remit au Seigneur ce qu’il avait employé pour lui pendant le temps qu’il avait passé en pays idolâtre et ne pouvait accomplir son vœu » (p. 628). Cette dîme ne représentait pas n’importe quelle proportion des revenus de Jacob, mais bien un dixième.

L’auteur a employé une expression courante dans les milieux adventistes, la « libéralité systématique », pour décrire la manière dont Dieu désire que Ses enfant donnent : « Dieu, le Créateur de l’homme, en instituant ce plan de libéralité systématique, a donné à chacun sa tâche, selon ses capacités » (p. 631). La libéralité systématique inclut la dîme de 10% et une certaine proportion des revenus comme offrandes. Elle emploie aussi l’expression « système de la dîme » pour confirmer que donner n’est pas supposé être un exercice livré au hasard et à la seule volonté du donateur, mais suit les instructions précédemment données par le Seigneur.

« La dîme peut être calculée sur la partie des revenus que chacun considère comme appropriée »

Cette opinion est souvent utilisée pour clore la discussion sur la question de la dîme calculée sur les revenus bruts ou nets ou autres. Elle a amené certaines personnes à conclure que cette question est une affaire de préférence ou de choix personnel. Cependant, plusieurs passages de ce même chapitre contredisent cette conclusion. Par exemple, l’auteur inclut l’expression « de tout » en parlant de la dîme promise et rendue par Jacob.

De plus, Ellen G. White fait une application du principe « de tout » à notre situation actuelle : « Nous devrions faire le premier prélèvement pour Dieu sur la totalité de nos revenus » (Testimonies for the Church, vol. 4, p. 474 ; cette phrase n’apparaît pas dans les Témoignages pour l’Église en français). Elle nous donne deux informations : a) nos dons à Dieu sont calculés sur la totalité de nos revenus ; et, b) la base de ce calcul est le montant gagné avant tout autre prélèvement ou déduction. Ce qu’un salarié ramène à la maison après avoir payé les impôts, les hypothèques et les obligations de services ne représente donc pas une base appropriée pour calculer la dîme.

Plaidoyer pour la fidélité

Après avoir répondu à ces conclusions erronées, qui ne sont pas en accord avec le message de ce chapitre, cette citation mérite notre considération. Comment comprendre l’exhortation à « donner comme il l’a résolu en son cœur » ? L’idée principale du chapitre 41 est de nous faire prendre conscience du caractère sacré des vœux ou engagements. Jacob nous en donne un exemple positif, tandis qu’Ananias et Saphira nous sont décrits comme des exemples à ne pas suivre. Ils volèrent Dieu et pratiquèrent le mensonge ; leur histoire nous est rapportée comme « un avertissement […] donné à tous les chrétiens de cette époque » (p. 624).

L’expression « comme il l’a résolu en son cœur », souvent interprétée comme désignant n’importe quelle impulsion, désir, plan ou souhait humain, a un sens différent dans ce chapitre. Dans ce contexte, elle désigne la résolutions prise comme résultat de l’action du Saint-Esprit sur le cœur d’une personne. Rapportant l’expérience de Jacob, Ellen G. White dit : « Jacob fit ce vœu au moment où la grâce divine restaurait son âme, ayant l’assurance que Dieu ne l’abandonnait pas » (p. 627). Ananias et Saphira passèrent aussi par une expérience similaire : « Influencés par l’Esprit de Dieu, ils s’engageaient à offrir au Seigneur certains terrains » (p. 624). Dans ces cas, « donner comme il l’a résolu en son cœur » résultait d’un acte de régénération divine ; c’était une résolution noble, pure, désintéressée et généreuse. L’auteur confirme cette manière de comprendre les choses : « Lorsque les hommes sont touchés par l’Esprit de Dieu, ils sont plus sensibles à ses sollicitations et ils prennent la résolution de renoncer à eux-mêmes et de faire quelque sacrifice pour la cause de Dieu » (p. 633).

L’action de l’Esprit de Dieu sur notre cœur exige une réponse conséquente. Jacob fit le vœu de donner la dîme de tout, suivant ainsi l’exemple donné par son grand-père Abraham (Genèse 14.19) ; Ananias et Saphira, encouragés par ce que faisaient d’autres croyants (Actes 4.36), devaient donner le produit total de la vente d’un terrain. De plus, il y a un appel à s’acquitter des décisions prises sous l’influence du Saint-Esprit : « Dieu exige qu’on s’acquitte fidèlement de ses vœux » (p. 624). Jacob demeura fidèle à son vœu de donner la dîme : « C’était une somme considérable, mais il n’hésita pas un seul instant. Ce qu’il avait consacré au Seigneur ne lui appartenait plus » (p. 628). En contraste, ce fut l’échec pour Ananias et Saphira ! Ils finirent par agir contrairement à la « résolution » que Dieu avait inspirée à leur cœur : « Mais lorsque Ananias et Saphira ne furent plus sous cette influence, l’impression ressentie perdit de sa force. Ils commencèrent alors à raisonner et à se demander s’ils rempliraient leurs engagements » (p. 624).

La citation d’Ellen G. White commence par ces mots : « Chacun doit être son propre répartiteur » (en anglais, « assessor »). C’est une invitation à s’examiner soi-même : Ma vie est-elle en accord avec la conviction que la Parole et l’Esprit de Dieu a créée en moi, ou me suis-je éloigné(e) de mes résolutions ? Les croyants doivent entreprendre cet exercice régulièrement et personnellement pour éviter le piège dans lequel tombèrent Ananias et Saphira. Mais cette expression implique-t-elle que les agents humains ne jouent aucun rôle pour influencer d’autres personnes à donner ?

Ellen G. White suggère le contraire : « Dieu agit par des instruments humains ; et tous ceux qui réveillent la conscience des hommes, qui les incitent à produire de bonnes œuvres et à s’intéresser réellement à l’avancement du règne de Dieu, ne le feront pas d’eux-mêmes, mais par l’Esprit qui agit en eux. Les vœux faits dans ces circonstances sont sacrés, étant les fruits de l’œuvre du Saint-Esprit » (p. 636). Par notre exemple et notre parole, nous pouvons encourager les autres à « résoudre dans leur cœur ». Dans la perspective de l’auteur, nous avons même la responsabilité de rappeler leurs vœux à nos semblables : « Une église est responsable des engagements de ses membres. Si un frère néglige d’accomplir ses vœux, il faut lui parler avec bonté, mais clairement » (p. 636).

Après avoir examiné cette citation dans le contexte du chapitre dans lequel elle se trouve, nous pouvons conclure avec confiance que Dieu nous a donné de claires instructions dans le domaine des dons et comment le faire. Il existe donc bien des directives divines pour cette discipline essentielle du style de vie chrétien. Dieu m’influence par Son Esprit, et ce qu’Il m’amène à « résoudre dans mon cœur » n’est pas en contradiction avec l’instruction qu’Il a déjà donnée. En réponse, c’est ma responsabilité ultime d’examiner ma vie personnelle pour vérifier si je demeure fidèle à la lumière reçue et à mon engagement envers Dieu.

Aniel Barbe

Conférence générale

Ministères de la Gestion chrétienne de la vie

Janvier 2023


[1] Ellen G. White, Témoignages pour l’Église, vol. 1 (Dammarie-les-Lys, France, Éditions S.D.T., 1960), p. 631. Cette citation se trouve sur la page du mercredi 18 janvier. « Répartiteur » est la traduction du mot anglais « assessor ».